Un film de Jean Renoir (1926), d’après Zola.

Avec : Catherine Hessling, Werner Krauss, Pierre Lestringuez, Jacqueline Forzane, Jean Angelo, Raymond Guérin, Catelain, Claude Autant-Lara, Pierre Champagne

Un échec commercial à sa sortie, ce film s’avère l’un des plus grands films de Renoir.

Sous le Second Empire, Nana, jeune actrice un peu vulgaire, ambitionne de jouer les grandes dames.
Elle devient, grâce à ses succès masculins, une courtisane avide de luxe et de plaisirs et abandonne bientôt la scène pour la vie galante. Un jeune prétendant, pour la conserver, s’endette, triche au jeu et se suicide. Le Comte Muffat, premier chambellan de l’Impératrice, devient l’esclave rampant de cette enfant capricieuse et pourvoit généreusement à ses goûts somptuaires.

Durée 2h30
DCP

Henri Langlois dit de ce film :
Mais s’il est loin de Zola par la forme, il est tout près de Zola par l’esprit. Nana
est un nouveau pas en avant dans la forme cinématographique. L’œuvre est tout près de Clarence Brown, tout près de ce classicisme totalement épuré qui fit la force du cinéma américain de la fin du muet.
Renoir a su voir L’Opinion publique de Chaplin, son réalisme et son pouvoir de simplification. Il a su comprendre toute l’importance de l’élément humain de l’acteur et c’est par là que le film marque un rappel à l’ordre et rejoint ce courant du retour au classicisme qui fut alors le renouveau du cinéma.
Pour mieux marquer la nécessité de la forme sur le fond, l’importance de l’élément vivant de cet acteur considéré par d’autres comme un objet ou un singe, Renoir, qui sera l’un des plus grands paysagistes du cinéma, l’un de ceux qui saura le mieux situer une action dans un milieu déterminé, efface le paysage, projette à l’arrière-plan le monde de Constantin Guys et du Second Empire, retrouve la simplification de
La Femme de nulle part pour éclairer de tous ses projecteurs les seuls acteurs.
Du cinéma allemand, il prend le plus grand acteur, Werner Krauss ; il fait surgir Catherine Hessling et la laisse imposer sa personnalité comme savent le faire les Américains pour May Murray, pour Gloria Swanson, pour Lillian Gish ; comme ils savent encore le faire pour Garbo ou pour Marlene Dietrich. Il la laisse vivre devant la caméra. Elle n’était pas la Nana de Zola, qu’importe : elle était la Nana de Werner Krauss, la Nana de Renoir, elle expliquait le drame, le justifiait par l’admiration, par la fascination qu’elle exerçait et qu’elle exerce encore sur les
spectateurs.
Ainsi allait s’imposer l’idée féconde des scénarios bâtis en fonction des interprètes choisis.
Mais on n’est pas impunément le fils d’Auguste Renoir et le film était tout rempli d’images qui évoquaient sans cesse Manet, Degas et Renoir.

Dans ce film sur les relations troubles entre le désir, l’argent et l’ambition, la musique s’attachera à jouer son rôle de musique de film : assumer l’aspect film en costume, avec le décor et l’environnement très XIXème siècle, tout en exprimant ou plutôt en accompagnant les sentiments, les ambiguïtés des rapports entre les personnages, les péripéties de l’action.

Christofer Bjurström, piano solo